Introduction, partie 1

         
             On raconte que les jeunes dames naissent dans les fleurs.

             Fille de lumière, Sveta avait pour père le soleil et pour mère la plus douce des humaines. Nul n’aurait pu dire, qui des deux avait la robe la plus éclatante. Sveta était née à l’aube, alors que les premiers rayons de son père venaient la nimber d’un halo de miel. Le bourgeon avait mûri, ses charmes s’étoffaient un peu plus chaque jour, et bientôt elle devint femme. Elle  avait la plus fine toison d’or d’Azeroth et lorsque le vent soufflait, sa longue chevelure se mettait à onduler en fines vaguelettes, emportant avec elle les effluves sucrés d’un millier de pétales. Ses lèvres étaient fines, d’un rose qui tirait vers le rouge et lorsqu’elle les mordillait, habitude qui lui était si particulière, elle laissait apparaitre deux petites quenottes bien dessinées, d’une blancheur éclatante, de sorte que tous les badauds du village devaient plisser les paupières pour ne pas s’y brûler. Les siennes, de paupières, elle ne les avait jamais closes, laissant paraître son regard bleu, d’un bleu si profond, qu’on eut envie d’y plonger. Ce n’est pas qu’elle vous regardait, non, cela s’apparentait plus à une forme d’hypnose : quiconque plongeait dans ses yeux se retrouvait happé, et dans ses abysses, quelles beautés oubliées les aventuriers pouvaient y trouver ! Tout un monde englouti y dormait, peuplé de créatures féériques et de royaumes oubliés, le reflet de ses rêves.

             Toute jeune déjà, elle rêvait de trouver l’amour, ce sentiment universel qu’elle voyait chaque jour lorsque sa mère la prenait dans ses bras. Mais nul ne trouvait grâce aux yeux de la belle. Celui-ci était pédant, celui-là voulait se l’accaparer et brider sa beauté, ce dernier, encore, était un gueux. Plus le temps passait, plus son cœur se parait d’épines et ceux qui, par témérité osaient lui demander sa main, se retrouvaient frappés de ses ronces. La beauté est un fardeau, les hommes la désiraient, certes, mais ils ne voulaient qu’un énième trophée, une tête de plus à leur tableau, une étreinte charnelle, qui n’avait de passion que le tribut de sang qu’ils voulaient lui ôter. Aimer le corps et aimer l’âme sont deux choses bien distinctes et la laideur a cet avantage qu’elle n’attire que ceux qui, subjugués par le cœur se prennent à devenir aveugles. Parfois elle sentait que peut-être était-ce là la solution : se livrer à un borgne qui l’aimerait pour son esprit.

Découvrez la suite des aventures de Sveta dans une prochaine publication, rendez-vous dans une semaine !